Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'OCTROI DES MOTS-GENTLY GIVEN WORDS
Archives
Derniers commentaires
29 décembre 2011

Demain matin -old piece revisited

Demain matin.

L'adjectif divin : l'au-delà de soi.

Ce pourrait être l'autre, vers lui tout au moins.

L'au-delà de soi dans le temps aussi : demain matin.

Dans la frange en deçà de l'au-delà et hors de moi, en marge du connu et qui frôle l'inconnu.

Le pas en avant que je fais avant que mon pied ne touche le sol.

Ce petit transport loin des grands transports de la joie et de l'allégresse, loin aussi de ceux de la mélancolie et de la dépression.

La somme de ces grands transports évoquent la tête qui tombe quand ils sont sans objet et anachroniques. Et apparemment ils peuvent l'être sans objet sauf à conjuguer l'adjectif divin sur le mode de la parole et de l'immanence -belle compréhension en cours où le futur proche jouxte le présent. Sous la forme du communicable et sur le fil d'une dimension diachronique l’adjectif divin avoisine l'art.

Oui, Camille, la musique est belle à qui sait l'écouter avec cette oreille là.

Loin aussi les petits transports de la transcendance anthropomorphisée à des fins idéologiques souvent.

Doter l'inconnu d'un projet, de sentiments et de volonté n'est- ce pas remplir l’autre du même ? La pire insulte faite à la spiritualité ce n'est pas la matérialité qui est son pendant nécessaire c'est le divin endimanché, le dogme.

L'adjectif divin exprime l'esprit de la poésie pure au sein d'une niche de sensibilité fine et travaillée.

 

 

La violence est dans la liaison causale, même involontaire, les totalitarismes aussi. L'adjectif divin, lui, qualifie. Il n'explique pas. Si l'adjectif divin est une dimension c'est celle de la conception impossible de cette violence. L'absence de virilité en effet. Il y a à apprendre du féminin, de cette révolution à éclore dont les prémisses existent.

 

L'entre-deux de la qualification, ce petit mouvement existentiel comparable à un transport éthique vers l'autre et le monde est contigu au féminin et lui donne son allant, sa lumière particulière. Le pas que je fais en direction de c’est autre que je ne peux encore nommer, au-delà de moi, je ne peux le faire dans l'obscurité. La lumière du féminin source d'intelligibilité du réel et modèle de la rencontre éthique, bien que liée à l'intimité de l'être, n'advient que dans un monde qui a pour cadre l'univers et où l'humain est à l'image des quatre éléments.

L'alchimie de mon corps, cette niche de sensibilité fíne et travaillée, est faite de cellules homogènes à la composition de l'univers et il serait négligeant de ne pas considérer l'importance des interactions qui nous relie à lui ne serait-ce que sur le plan de l'énergie. Si l'esprit de la médecine chinoise et sa conception du corps comme étant traversée de méridiens, véritables canaux d'énergie, est convoquée ici c'est précisément que je suis en bonne santé.

Je ne rejoue pas sans fin mon histoire dans le cadre conflictuel du microcosme familial mais en accord avec le monde physique, en accord aussi avec l'histoire de l'humanité par la structure ADN de mes cellules sur lesquelles sont imprimées les circonvolutions de l'espèce humaine.

Et le pendant social de mon existence n'est pas le fruit d'un déterminisme de type Darwinien et de la théorie caduque de l'évolution de son auteur au terme de laquelle l'homme se voit consacré comme l'être supérieur aux dépends de la femme car il existe un arbitraire de la position sociale. L'injustice est gratuite et chercher à la justifier à des fins idéologiques revient à justifier l'existence du mal.

Le petit transport de l’appréhension me rend plus belle parce que je suis une femme et que j’existe dans mon corps traversé, modelé et orienté par ma pensée et mes schémas affectifs d’abord pour moi-même. Mon corps comme façon d’autodétermination est le mouvement inaugural d’une pensée libre d’inspiration féminine dont la femme n’a pas le monopole, l’homme non plus.

Demain Matin est l’autre nom d’une utopie de l’humain qui, trouve parfois à s’actualiser. L’œuvre ethnologique de Claude Lévi-Strauss ici intéresse et particulièrement un passage de « Tristes Tropiques » représentatif peut-être de ce petit transport de l’a(com)(p)préhension éthique de l’autre et du monde : « Que le miracle se produise, que, de part et d’autre de la fêlure, surgissent côte à côte deux vertes plantes d’espèces différentes, dont chacune a choisi le sol le plus propice ; et qu’au même moment se devinent dans la roche deux ammonites aux involutions inégalement, attestant à leur manière un écart de quelques dizaines de millénaires : soudain l’espace et le temps se confondent ; la diversité vivante de l’instant juxtapose et perpétue les âges. La pensée et la sensibilité accèdent à une dimension nouvelle ou chaque goutte de sueur, chaque flexion musculaire, chaque halètement deviennent autant de symboles d’une histoire dont mon corps reproduit le mouvement propre, en même temps que la pensée en embrasse la signification. Je me sens baigné par une intelligibilité plus dense, au sein de laquelle siècles et les lieux se répondent et parlent des langages enfin réconciliés."

Une certaine qualité de sensibilité (proche de la passivité que réhabilite Emmanuel Levinas) permet à la pensée du chercheur de se laisse informer par son objet d’étude (à la façon dont Le Clézio se laisse informer par son personnage Lalla dans « Désert »  :«(...) chaque goutte de sueur, chaque flexion musculaire, chaque halètement deviennent autant de symboles d’une histoire dont mon corps reproduit le mouvement propre, en même temps que la pensée en embrasse la signification. »

Et le récit plus poétique que conceptuel que Lévi-Strauss fait de ses recherches fructueuses attestent de la reconnaissance que le petit transport émotionnel (indice d’une pensée douée de sensations, concomitant à la découverte n’est pas un « obstacle épistémologique » pour reprendre une notion développée par l’épistémologue Gaston Bachelard dans « La Formation de l’ ’Esprit Scientifique ». Nous sommes ici aux antipodes de cette « catharsis de la subjectivité et de la sensibilité » prônée par ce même auteur en matière de démarche scientifique. C’est un témoignage humain que nous livre Lévi-Strauss dans ce passage ou il ne prétend jamais détenir la vérité ultime sur le phénomène étudié (Il n’est pas de monopole de la pensée relative au secret de la nature).

Tous ces éléments entrent en connivence avec une pensée d’inspiration féminine qui suppose une formation de la personne dont le premier aspect est le décentrement.

Le penseur Lévi-Strauss n’est pas le lieu de la première certitude conçue contre un monde dont il mettrait l’existence en doute dans un geste non dénué d’angoisse, ce sentiment étant à l’origine selon Maria Zambrano de l’édification de systèmes de pensée dont la première nécessité est la réassurance « L’angoisse comme exhalaison de toute cette métaphysique - elle vise le père de la métaphysique moderne : Descartes-comme révélation ultime de ses origines (...) d’où sont issus dans leur orgueil et leur clôture tant de systèmes de pensée (... )Le système est ce qui seul rassure l’angoissé, château des raisons, muraille close de pensées invulnérables face au vide » (« Poésie et Philosophie », José Corti, 2003).

Lévi-Strauss a toujours déjà franchi le mur invisible du solipsisme et cela rend la rencontre avec le monde incluant son objet d’étude qu’il qualifie de « miraculeuse » néanmoins possible et pacifique.

Se trouve peut-être une description de l’état psychologique dans lequel se trouve le chercheur en proie au solipsisme objectif dans le roman de Marlène Haushofer « Le Mur Invisible » et celle-ci n’est pas dénuée de pathos. Une inspiration féminine de la pensée souffle celle-ci au-delà du solipsisme. L’intelligibilité du réel et son corollaire : la rencontre avec le monde et l’autre est possible.

Une pensée d’inspiration féminine ou celle-ci aurait le pouvoir de mettre à bas cette muraille close de la façon suivante : en histoire de l’art depuis le Quattrocento le féminin associé à la couleur représente dans la peinture ce qui déborde le trait de l’artiste. Cette « petite insurrection » de la couleur a le pouvoir de sinon le réel du moins sa représentation. Il faut peut-être puiser dans ce pouvoir insurrectionnel du féminin l’au-delà du solipsisme et une force de représentation non totalisante du monde.

Une autre pensée de la sortie du solipsisme est de considérer avec Bracha Lichtenberg le féminin comme une « matrice sans abrogation ni fusion »( « matrix, Halala, lapsus » MOMA Oxford, 1994) c’est- à -dire comme un lieu de passage vers le dehors, l’essence même de l’au-delà de soi, le mouvement physique et sensoriel vers le monde et l’autre ( « Le pas en avant que je fais avant que mon pied ne touche le sol » : « Demain matin »).

Le féminin : le phénomène naturel de l’être-dans-le monde du divers et de la différence permet de comprendre en miroir cet extrait de « Tristes Tropiques » comme un savoir-faire se commuant en savoir-être d’où l’admirable approche du scientifique.

Pour que cette rencontre avec l’autre et le monde n’ait pas l’aspect volatile de l’opinion et des préjugés cela suppose de la part du scientifique une technique d’objectivation de la réalité sociale ou naturelle étudiée. Cette pratique permet d’établir une distinction entre ce que l’on croit et ce que l’on sait c’est-à-dire ce dont il est possible d’administrer la preuve. Ainsi se construit un savoir toujours provisoire par différence avec l’opinion mais aussi avec le concept. Une culture cultivée si l’on veut ou ce qui se repère derrière la diversité des phénomènes ce n’est pas tant les invariants que la cohérence à l’instant t. Cela suppose une pris en compte de la temporalité « (... )Soudain l’espace et le temps se confondent ; la diversité vivante de l’instant juxtapose et perpétue les âges » quitte à en éprouver du vertige, un vertige doublé chez Lévi-Strauss de celui, de la compréhension des phénomènes : « Je me sens baigné par une intelligibilité » plus dense, au sein de laquelle les siècles et les lieux se répondent et parlent des langages enfin réconciliés ».

 

 

 

 

Publicité
Commentaires
L'OCTROI DES MOTS-GENTLY GIVEN WORDS
Publicité
Publicité